Entretien avec Julie Therrien-Meunier

07 octobre 2025
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Approvisionnement municipal : prévenir les dérapages, une clause à la fois

Coordonnatrice à l’approvisionnement municipal au SAM, Julie Therrien-Meunier accompagne au quotidien les municipalités dans la rédaction de devis, l’analyse de soumissions et la navigation complexe des appels d’offres. Nous avons discuté avec elle du cœur de son travail, de l’évolution des règles… et de l’art de prévenir les pépins contractuels avant qu’ils n’éclatent.

Quand tu dis que tu travailles au SAM, comment expliques-tu ce que tu fais, concrètement?

Je commence par dire qu’on est la section de l’approvisionnement municipal de la division infrastructures et de l’adaptation aux changements climatiques de la Fédération québécoise des municipalités (FQM). On accompagne les municipalités dans la préparation et la gestion de leurs appels d’offres, autant pour les services professionnels que techniques. On intervient, par exemple, pour l’achat de bacs de recyclage, les contrats de déneigement, l’achat de véhicules ou l’installation de compteurs d’eau. Notre rôle? S’assurer que les documents sont complets, que les règles sont respectées et que les projets se réalisent en toute conformité.

Comment en es-tu venue à travailler dans un domaine aussi pointu que l’approvisionnement municipal?

Par la pratique. J’ai commencé comme technicienne en approvisionnement à la Ville de Saint-Jérôme. J’ai eu la piqûre pour ce domaine à la fois concret et stratégique. Il n’y a pas de parcours unique : certaines personnes proviennent du droit, d’autres de l’administration, comme moi. Moi, j’ai appris sur le terrain, en me formant au fil des mandats et en suivant des formations, notamment avec la Corporation des officiers municipaux agréés du Québec (COMAQ). Ce qui m’a retenue? La diversité des projets et l’impact direct sur les municipalités. Un bon appel d’offres, c’est un projet qui démarre du bon pied.

Ta semaine de travail est-elle aussi variée que les projets que tu accompagnes?

Totalement. Il n’y a pas vraiment de routine. Je peux commencer la semaine avec une municipalité qui souhaite rénover un pont et la finir avec une autre qui prépare l’appel d’offres pour des audits. Entre-temps, je peux siéger à un comité de sélection, valider des devis ou répondre à des questions de gestion contractuelle. Chaque jour, on passe de l’analyse technique à la vulgarisation juridique, selon les besoins des municipalités.

Quel est le cœur du mandat du sam en matière d’approvisionnement?

Notre rôle, c’est de soutenir les municipalités dans toutes les étapes de leurs projets d’approvisionnement : rédaction de devis, accompagnement lors de l’appel d’offres, analyse de la conformité des soumissions, etc. On peut même gérer l’ensemble du processus, de la rencontre initiale jusqu’à la recommandation d’octroi. On siège aussi à des comités de sélection et on conseille les directions générales et les directions de travaux publics pour éviter les pièges. L’objectif, c’est de s’assurer que le projet est solide, conforme et transparent. En somme, on agit à la fois comme filet de sécurité et comme copilote.

Intervenez-vous plus souvent pour prévenir les erreurs ou pour éteindre des feux?

Les deux! L’idéal, c’est quand on est appelés tôt. Quand on entre au bon moment, on peut orienter les choses, prévoir les risques, ajuster les devis, bien calibrer les attentes. Mais on est parfois aussi sollicités pour corriger le tir quand un document est jugé non conforme ou quand une soumission soulève des enjeux. Dans tous les cas, notre approche reste la même : accompagner, sécuriser, documenter.

Quand une municipalité vous demande un « appel d’offres clé en main », à quoi cela ressemble-t-il?

On commence par une rencontre de démarrage. Où en est le projet? Est-ce que le terrain ou le cadre est identifié? Y a-t-il des subventions en jeu? Ensuite, on évalue le temps requis et on soumet une offre de services. On constitue l’équipe en fonction du mandat – parfois, ça prend un architecte, un ingénieur, ou les deux – et on avance en étroite collaboration avec la municipalité. Tout est construit sur mesure, selon les besoins, parfois jusqu’à l’analyse de la conformité des soumissions, en passant par la mise en ligne sur le site d’appel d’offres du gouvernement (SEAO).

Quels outils utilisez-vous pour assurer ce niveau d’accompagnement?

On a développé plusieurs gabarits internes pour structurer les devis, les clauses administratives, les grilles de sélection. On les adapte à chaque mandat, toujours en fonction de la réglementation en vigueur, du contexte et des besoins. L’idée, c’est d’offrir des documents clairs, cohérents, faciles à comprendre, mais contractuellement solides. On veut éviter les zones grises et protéger les municipalités en amont.

Quelles erreurs retrouvez-vous souvent dans les documents soumis par les municipalités?

Des clauses floues, des devis incomplets, des estimations inexactes ou absentes, ou encore des exigences sont des détails qui peuvent paraître mineurs, mais qui ont des impacts majeurs. Par exemple, une mauvaise estimation peut compliquer l’octroi ou la négociation d’un contrat. Une clause imprécise peut ouvrir la porte à des recours. Notre rôle, c’est de les aider à éviter ça.

Selon toi, qu’est-ce que les petites municipalités sous-estiment le plus souvent dans leurs processus d’approvisionnement?

L’importance d’un devis bien ficelé. Beaucoup de petites municipalités n’ont pas les ressources à l’interne pour suivre toutes les mises à jour réglementaires et être expertes dans tous les domaines. Or, les règles évoluent et certains projets sont particulièrement pointus. Il faut s’assurer que les documents sont conformes, que les clauses sont claires et que le tout respecte les exigences de l’autorité des marchés publics (AMP). Et bien sûr, toujours garder en tête que c’est le (la) citoyen(ne) le (la) bénéficiaire. Il faut donc chercher le meilleur rapport qualité-prix en favorisant la concurrence, tout en étant juste et rigoureux en matière contractuelle.

On veut éviter les zones grises et protéger les municipalités en amont.