À l’aube de son 45e anniversaire, le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) reste bien ancré sur la vision qui a mené à sa création le 21 décembre 1978. Récemment nommé à la présidence de l’organisme phare de la consultation publique, M. Alain R. Roy compte suivre les traces de son fondateur, le premier à occuper le poste de ministre de l’Environnement au Québec, Marcel Léger. Comme pour lui, le citoyen est un partenaire indispensable dans le processus de prise de décisions concernant les projets susceptibles d’avoir un impact majeur sur l’environnement.
Le caractère unique du BAPE est qu’il est le seul organisme qui permet aux citoyens d’exercer leur droit de parole en prenant part aux décisions qui les concernent, explique-t-il. C’est une institution dont la raison d’être demeure toujours aussi pertinente après 45 ans puisqu’elle incarne l’idéal de la démocratie participative au Québec. »
Expert en éthique et en déontologie, le nouveau président du BAPE possède un parcours professionnel riche et inspirant. Après une maîtrise en histoire, M. Roy a complété un baccalauréat et une maîtrise en droit. Au cours de sa carrière, il a principalement œuvré dans le monde municipal, que ce soit comme secrétaire-trésorier de la Municipalité de Saint-Placide, greffier à la Ville de Lac-Brome, greffier de la MRC des Maskoutains et secrétaire de l’arrondissement de Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles de la Ville de Montréal. Depuis 2017, il était juge administratif et membre de la Commission municipale du Québec.
Une passion pour le contact avec le public
« J’ai fait au moins une cinquantaine de consultations publiques au fil de ma carrière, relate-t-il en partageant sa passion pour le contact avec le public. Dans le monde municipal, quand on est greffier ou secrétaire d’arrondissement, c’est à nous que revient la tâche d’organiser des consultations publiques. C’est là que j’ai réalisé que c’est un art de rejoindre le public et, à ce chapitre, le BAPE possède une expertise singulière qui a de quoi nous rendre tous très fiers. »
« La participation citoyenne est au cœur de la mission du BAPE, elle fait partie de son ADN, affirme-t-il sans détour en évoquant quelques données probantes. Depuis sa création, le Bureau a tenu près de 3 000 séances publiques de consultation qui ont permis à plusieurs centaines de milliers de personnes de participer. Au cours des quelque 375 consultations publiques tenues, ce sont plus de 16 000 mémoires qui ont été présentés par des personnes, des groupes, des organismes ou des municipalités. »
Informer, consulter, enquêter et aviser
Le BAPE joue quatre rôles majeurs : il informe et consulte la population, il enquête et avise afin d’éclairer la prise de décision gouvernementale. Les constats et avis contenus dans les rapports de ses commissions d’enquête sont le fruit d’une analyse rigoureuse qui intègre les enjeux écologiques, sociaux et économiques ainsi que les préoccupations exprimées par la population. D’ailleurs, chaque rapport contient un chapitre réservé aux points de vue citoyens.
« Que ce soit lors d’audiences publiques ou de consultations ciblées, les opinions émises par les participantes et participants sont prises en compte, poursuit M.Roy. Elles permettent d’enrichir l’analyse et de compléter l’enquête faite par les commissions. Par leurs questions et leurs préoccupations, les citoyennes et citoyens peuvent apporter un éclairage soulevant de nouveaux enjeux et faire évoluer le regard de la commission sur le projet et sur sa justification. »
Pour lui, il est important que les gens sachent qu’ils peuvent faire une différence et qu’ils ont du pouvoir. « Le pouvoir citoyen s’étend encore plus largement lors des périodes d’information publiques », explique-t-il en mentionnant qu’il suffit alors d’une seule personne pour amener le ministre à confier au BAPE un mandat d’audience publique, de consultation ciblée ou de médiation.
Une mission basée sur la confiance
La capacité du BAPE à réaliser sa mission est directement liée à la confiance que lui accordent la population et les autorités. C’est aussi ce qui lui confère sa légitimité. La confiance du public envers l’institution est aussi un enjeu que le nouveau président prend très au sérieux.
« Le fonctionnement du BAPE a plusieurs similitudes avec celui de la Commission municipale. Sa structure de gouvernance et son type de fonctionnement, particulièrement les commissions d’enquête, qui ressemblent quelque peu à une fonction juridictionnelle, reposent sur une autonomie à l’abri de toute influence externe. Pour y parvenir, il est nécessaire de respecter les devoirs et les responsabilités en matière d’éthique et de déontologie, deux fondements essentiels pour maintenir la confiance du public envers l’institution. »
Puisqu’il existe une corrélation positive entre la confiance accordée et le taux de notoriété, M. Roy entend contribuer à faire rayonner le BAPE au cours des 5 prochaines années. « Il faut bien expliquer nos rôles et s’assurer d’offrir les conditions propices à une participation diversifiée et inclusive. Aussi, dans le contexte actuel où l’on observe une montée de la désinformation, de la polarisation, du cynisme et de la méfiance envers les institutions, il est essentiel pour le BAPE de tout mettre en œuvre pour favoriser la participation publique. »
Dans le but de mieux faire connaître son rôle, de favoriser et de diversifier la participation, le BAPE a développé de nouveaux outils de communication et mis en place de nouveaux moyens pour faciliter la participation publique. Par exemple, une plateforme numérique offrant un large éventail de moyens pour participer a notamment été mise en ligne. La transmission de documents est simplifiée et les moyens pour exprimer un point de vue sont élargis. Aussi, bien qu’il demeure fondamental pour le BAPE de se déplacer et d’aller à la rencontre des communautés susceptibles d’accueillir un projet, les séances publiques sont désormais toutes tenues en mode hybride.
Enfin, l’arrivée du nouveau président sera marquée par un renforcement des partenariats afin de partager l’expertise développée par le BAPE en matière de consultation citoyenne. Un premier rendez-vous est prévu le 30 janvier 2024 à Québec. Ce sera l’occasion de partager les bonnes pratiques avec d’autres organismes publics voués à la consultation et à la participation publique, dont les organisations municipales.