Par Mme Raphaelle Croteau
Professionnelle en génie côtier | Direction de l’ingénierie, des infrastructures et de l’adaptation aux changements climatiques
Fédération québécoise des municipalités
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L’été 2023 a marqué le Québec avec ses pluies intenses et fréquentes. Les forts débits ainsi générés aux cours d’eau ont eu des impacts majeurs sur les berges et les infrastructures qui s’y trouvent. De nombreuses conséquences dévastatrices de l’érosion riveraine ont été observées, notamment des glissements de terrain, des routes et des ponceaux emportés ainsi que des talus affaissés.
Dans un contexte de changements climatiques, l’été 2023 nous donne malheureusement un aperçu de ce qui est à venir. Heureusement, des mesures d’adaptation peuvent être mises en place pour minimiser les impacts négatifs.
Impacts des changements climatiques sur les cours d’eau
Les changements climatiques entraînent une augmentation de la fréquence et de l’intensité des événements climatiques extrêmes comme les épisodes de fortes précipitations, les sécheresses et les tempêtes.
Les cours d’eau seront de plus en plus affectés par ces événements météorologiques extrêmes. Les pluies intenses entraînent des crues importantes qui peuvent mener à des inondations ou à l’érosion des berges. À l’opposé, les périodes de sécheresse entraînent des étiages plus prononcés et plus prolongés.
Les redoux hivernaux seront également de plus en plus fréquents. Lors de ceux-ci, les sols sont bien souvent gelés ou saturés en eau, l’eau ruisselle donc plus rapidement vers les cours d’eau et augmente leurs débits rapidement. Les redoux limitent aussi le développement d’un pied de glace qui protège les berges de l’érosion lors des crues printanières.
La combinaison de tous ces phénomènes augmente considérablement l’érosion des cours d’eau.
L’érosion est un processus par lequel les sols des berges d’un cours d’eau sont mobilisés, puis transportés par les courants et déposés plus loin en aval. La présence d’obstacles et de méandres rend les tronçons des cours d’eau et les infrastructures qui s’y trouvent encore plus vulnérables.
Afin d’être mieux préparé pour les crues à venir, différentes mesures peuvent être prises pour atténuer les risques associés à l’érosion riveraine.
Agir en amont du problème : travailler à réduire les débits de pointe
Pour l’érosion riveraine, les mesures qui permettent de réduire les débits de pointe sont à privilégier, d’autant plus qu’elles permettent également d’atténuer les risques d’inondation.
Ces mesures consistent principalement à intervenir en amont dans le bassin versant. Elles peuvent inclure :
1. L’augmentation des surfaces perméables
Les surfaces perméables permettent d’augmenter l’infiltration de l’eau dans le sol et d’ainsi réduire le ruissellement de surface. Cela restreint les débits de pointe au cours d’eau et la pression sur les infrastructures de gestion des eaux pluviales;
2. L’augmentation des surfaces végétalisées
Les surfaces végétalisées absorbent mieux l’eau et réduisent la vélocité de l’écoulement lors des inondations, ce qui réduit également les débits;
3. La restitution, le maintien ou la création de milieux humides
Les milieux humides agissent comme des éponges. Lorsqu’ils sont en bonne santé, ils offrent une bonne rétention;
4. Limiter les débits de pointe autorisés pour tout nouveau projet
La plupart des projets immobiliers nécessitent du déboisement et l’imperméabilisation des surfaces, ce qui augmente le ruissellement;
5. Aménager des ouvrages de rétention
L’aménagement d’ouvrages de rétention et d’infiltration, comme des jardins de pluie ou des bassins de rétention, permet une meilleure gestion des eaux pluviales et la réduction des débits.
Agir à l’échelle du cours d’eau : travailler à réduire la vulnérabilité à l’érosion
Bien qu’il soit préférable d’intervenir en amont, des mesures applicables au cours d’eau et à ses berges permettent de réduire la vulnérabilité des infrastructures qui s’y trouvent. Ces mesures incluent notamment :
1. Laisser un espace de liberté au cours d’eau
Les cours d’eau peuvent être mobiles et leur laisser de l’espace à cet effet (par exemple, en établissant une réglementation limitant l’occupation et l’urbanisation des berges et des zones inondables ou en relocalisant des bâtiments ou des infrastructures stratégiques) permet de diminuer l’exposition aux risques;
2. Favoriser la végétation en berge
Les végétaux absorbent une partie des surplus d’eau et leur système racinaire stabilise les sols;
3. Dimensionner adéquatement les infrastructures
Lors de leur remplacement, il importe de dimensionner les infrastructures (ponceaux, fossés, bassins de rétention, etc.) en fonction des projections climatiques pour les précipitations. Il est aussi nécessaire d’en faire l’entretien régulièrement pour éviter toute obstruction;
4. Stabiliser les talus en érosion
Cette option, de dernier recours, peut être envisagée pour protéger des infrastructures clefs (comme des routes), qui sont exposées à l’érosion riveraine. Les méthodes les plus communes sont les enrochements et le génie végétal, mais d’autres solutions existent. Il est toutefois important de s’assurer de ne pas générer des problèmes ailleurs dans le cours d’eau en effectuant des interventions.
Conclusion
Les précipitations extrêmes sont amplifiées par les changements climatiques; l’érosion qu’elles génèrent apporte son lot de défis et les conséquences se font déjà sentir sur le Québec.
Toutefois, plusieurs solutions peuvent être mises en place pour limiter les impacts négatifs. Dans la plupart des cas, le coût des mesures préventives est beaucoup moins élevé que celui des réparations après un sinistre. Investir en prévention est toujours un choix judicieux!
La direction de l’ingénierie, des infrastructures et de l’adaptation aux changements climatiques de la Fédération québécoise des municipalités (FQM) est là pour vous accompagner dans vos projets spécifiques. De plus, un webinaire sur l’érosion riveraine sera aussi offert à l’hiver 2024.
Restez à l’affût!