Dans la foulée des nombreux cas de menaces et d’intimidation envers les élus·es municipaux survenus récemment, le gouvernement du Québec a déposé en avril dernier le projet de loi 57 (PL 57), visant à protéger ceux-ci et à favoriser l’exercice de leurs fonctions sans entraves. Le projet de loi omnibus de la démocratie municipale a fait couler beaucoup d’encre dans les derniers mois. Nous faisons un survol de la question.
Le 6 juin dernier a été sanctionnée la Loi édictant la Loi visant à protéger les élus·es municipaux et à favoriser l’exercice sans entraves de leurs fonctions et modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal. Celle-ci a, entre autres, édicté la Loi visant à protéger les élus·es municipaux et à favoriser l’exercice sans entraves de leurs fonctions (LPEM) qui vient répondre aux demandes du monde municipal en matière de protection contre l’intimidation et le harcèlement.
Portée de la LPEM
Le principal objectif de cette Loi est de protéger les élus·es municipaux et de garantir qu’ils puissent exercer leurs fonctions sans interférences. Plus précisément, elle vise à assurer que les élus·es municipaux puissent travailler dans un cadre sécuritaire et respectueux, à l’abri de toute forme d’intimidation
ou de violence, permettant ainsi un fonctionnement plus efficace et harmonieux de la démocratie municipale et des affaires courantes de chaque municipalité.
La LPEM modifie également diverses dispositions législatives existantes afin de s’assurer que les élus·es disposent des ressources et du soutien nécessaires pour remplir leurs mandats de manière efficace et sans entraves. Elle inclut des mesures de prévention et des mécanismes d’intervention en cas de situations de menaces ou de harcèlement.
Par cette Loi, le gouvernement entend donc favoriser un environnement où les élus·es peuvent s’acquitter de leurs responsabilités sans subir de pressions indûment et mieux protéger les institutions démocratiques.
Réaction du monde municipal
La réaction des municipalités face au dépôt du PL 57 en avril 2024 a été généralement positive. De nombreux élus·es municipaux ont pris la parole pour accueillir favorablement l’initiative du gouvernement. Celui-ci reconnaissait pour la première fois de façon officielle les défis et les risques auxquels les élus·es municipaux sont confrontés dans le cadre de leur travail et présentait un
soutien législatif pour leur permettre de remplir leurs fonctions sans crainte de représailles ou d’intimidation.
Les associations municipales se sont également mobilisées pour appuyer le projet de loi dès son dépôt, soulignant l’importance de créer un environnement de travail sécuritaire et respectueux pour les élus·es municipaux. La Fédération québécoise des municipalités (FQM) a d’ailleurs présenté, le 30 avril 2024, un
mémoire signifiant son appui aux objectifs du projet de loi ainsi qu’aux principales modalités, notamment la protection des élus·es et des institutions démocratiques municipales. La multiplication des cas de violence et de harcèlement rapportés par les élus·es municipaux dans les dernières années
étant un fléau contre lequel la Fédération lutte activement.
À la suite de l’adoption de la Loi, la FQM a notamment souligné qu’il s’agissait d’une étape importante pour la démocratie locale. La Loi permet d’atteindre un équilibre entre le respect et la sécurité des élus·es et la protection de la voix citoyenne, des échanges et des débats qui sont partie intégrante d’une saine démocratie.
Impacts sur les municipalités des régions
Le monde municipal a souligné certains impacts anticipés dans la mise en oeuvre pratique de la LPEM, particulièrement en ce qui a trait aux ressources nécessaires pour assurer la protection des élus·es et à la clarté et à l’efficacité des mécanismes de prévention et d’intervention prévus par la Loi. En effet, cette dernière pourrait avoir des impacts spécifiques aux petites et moyennes municipalités, en raison de
leurs ressources limitées et de leurs particularités locales.
Exercice démocratique
En offrant une meilleure protection, les élus·es en place peuvent se concentrer davantage sur leurs tâches sans craindre pour leur sécurité personnelle. Un environnement où les élus·es se sentent protégés favorise également un climat politique plus serein et productif, propice à la bonne gouvernance. De même, la Loi pourrait avoir pour effet de rendre le rôle d’élu·e plus attrayant, ce qui est crucial pour les petites municipalités, où le recrutement de candidats peut être un défi.
Certains observateurs ont toutefois exprimé des réserves quant à l’impact que la Loi pourrait avoir sur le processus démocratique. Dans les petites communautés, où les interactions entre élus·es et citoyens sont souvent plus directes et fréquentes, celle-ci pourrait changer la nature de ces relations, en introduisant
des mesures de protection qui pourraient être perçues comme une barrière. Il sera nécessaire de trouver un équilibre entre la protection des élus·es et le maintien de relations de proximité avec les citoyens.
Dans le même sens, il est important de former les élus·es et le personnel administratif des municipalités sur les nouvelles dispositions de la Loi, afin de s’assurer qu’elles soient bien comprises et correctement mises en oeuvre, et pour éviter que des mesures trop strictes ou mal appliquées puissent créer des
tensions ou des malentendus.
Charges financières
Les petites municipalités ayant des budgets restreints pourraient trouver difficile de financer les nouvelles mesures de protection. De même, la mise en oeuvre de la Loi pourrait engendrer des tâches administratives supplémentaires, ce qui pourrait nécessiter l’embauche de personnel additionnel. Toutefois, ces coûts peuvent être considérés comme des investissements pour assurer un climat
politique stable et sécuritaire.
Soutien psychologique
Les municipalités doivent s’assurer que les élus·es ont accès à des services de soutien psychologique s’ils sont victimes d’intimidation ou de violence. De plus, la sensibilisation et la formation sur la résilience et la gestion des crises deviennent essentielles pour aider les élus·es à faire face à des situations difficiles.
Les organisations municipales membres de la FQM ou assurées par le Fonds d’assurance des municipalités du Québec ont accès à une couverture d’assurance pour soutenir les élu·es, les employés municipaux et leur famille immédiate qui font face à de l’intimidation ou à du harcèlement.
Conclusion
Ainsi, la LPEM apporte des avantages importants en termes de sécurité et de participation démocratique. Toutefois, les municipalités auront à gérer certains enjeux spécifiques liés à leurs ressources limitées et à leur dynamique locale.